Le blasphème
Personne ne devrait aller en prison, être battu ou même mourir pour avoir écrit un tweet, un poste sur Facebook, avoir déclaré son athéisme ou avoir questionné une religion.


Comprendre laïcité, caricature et blasphème en quelques lignes
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Être libre de croire ou de ne pas croire, c’est poser la question du blasphème qui est pour un croyant le fait de manquer de respect aux dogmes religieux. Le délit de blasphème n’existe plus en France depuis la révolution, principe réaffirmé par la loi de 1881 sur la liberté de la presse. La caricature, différente du blasphème, déforme la réalité pour faire rire et réfléchir sur les abus de pouvoir, qu’ils soient politiques, économiques ou religieux. La loi protège donc la liberté de la presse et les caricatures. Mais attention, tout n’est pas autorisé : les citoyens ne peuvent être injuriés ou diffamés en tant que croyants, seules les idées peuvent être contestées.
Retour sur des distinctions fondamentales: Être libre de croire ou de ne pas croire, cela pose aussi la question du blasphème qui est pour un croyant le fait de manquer de respect aux dogmes religieux. Le délit de blasphème n’existe plus en France puisque la République est neutre, et que les règles religieuses ne la regardent pas. L’idée de supprimer le délit de blasphème vient des philosophes des Lumières que sont Rousseau, Diderot et Voltaire.
Une histoire en particulier avait marqué les révolutionnaires, l’histoire du chevalier de La Barre : il s’agit d’un jeune homme qui avait eu l’audace de chanter des chansons se moquant des religieux, et de garder son chapeau au passage d’une procession. Il fut condamné à avoir la langue tranchée, puis à être décapité, puis brûlé, on n’est jamais trop prudent. A cette époque, l’Eglise catholique au pouvoir défendait une vision très rigoriste. Voltaire qui a défendu avec acharnement le chevalier de La Barre estimait que les hommes et les femmes devaient avoir le droit de croire ou de ne pas croire et la liberté de l’exprimer. Comme tous les philosophes des Lumières, ils faisaient une distinction entre croyance et connaissance et renvoyaient la croyance à la sphère personnelle pour que chacun soit libre de trouver sa place en société.
En 1881 sous la IIIe République, on vote la grande loi sur la liberté de la presse. Les caricaturistes de l’époque s’en donnent à cœur joie. 25 ans avant la loi de séparation des Eglises et de l’Etat, on aborde à l’assemblée la question du blasphème. Les débats sont très violents, parce qu’à l’époque il y a de nombreux députés affiliés à ce que l’on appelait le parti catholique. A l’évêque d’Angers qui veut interdire le blasphème et qui invoque la blessure des catholiques outragés, Georges Clémenceau répond : « Dieu se défendra lui-même, il n’a pas besoin pour cela de la chambre des députés. Depuis cette grande loi, et même avant, il y a une tradition française de la satire et de la caricature.
Qu’est-ce qu’une caricature ? C’est déformer et exagérer la réalité dans un dessin ou un texte pour faire rire ou réfléchir. Une caricature n’est pas une insulte, même si elle n’est pas toujours drôle, c’est une tentative de mettre en lumière les excès d’un pouvoir, qu’il soit religieux, politique, ou financier, pour rappeler à ceux qui en abusent que leur pouvoir ne peut être absolu. Hara-Kiri, Charlie Hebdo, ou le Canard Enchaîné sont des descendants des caricaturistes du XIXe siècle et du chevalier de La Barre.
Pendant des années, ces journaux se sont moqués des évêques et du pape qui refusaient toutes les évolutions en matière de meurs, mixité, divorce, contraception, avortement. Pour faire avancer les débats, ces journalistes et dessinateurs utilisent l’humour. Depuis toujours, ils l’appliquent aux idées politiques, sociétales ou religieuses, et ils n’ont pas hésité à l’utiliser quand une partie de l’Islam s’est raidie, et a remis en cause parfois violemment les libertés fondamentales.
Au-delà du blasphème pour les croyants, les caricatures, qu’on les trouve drôles ou pas, nourrissent le débat d’idées.
Pour faire simple, le blasphème n’est pas un droit, mais on ne peut pas être puni par la loi pour ça. Ce sont des affaires de croyants, pas les affaires de l’Etat. Ce qui est interdit, et que la loi sanctionne, ce sont les injures, ou la diffamation de personnes ou de groupes, ou les appels à la haine. La justice défend les citoyens, mais elle n’est pas là pour défendre ou faire respecter les idées religieuses. Toutes les idées peuvent être débattues, contestées, voire même moquées.
La laïcité est un outil qui comme tous les outils subit les influences de l’environnement politique, social et culturel, elle ne corrige pas les injustices et ne peut refaire l’histoire, mais doit garantir à tous les citoyens avec leurs croyances et leurs connaissances de pouvoir être libres, égaux, et fraternels. (Source: France télévision Lumni La laïcité, caricature et blasphème)

Toute idéologie doit être ouverte au débat sans peur de représailles. Aucune exception!. L’islamophobie, la christianophobie ne sont pas du racisme, pas plus que la «communismophobie », la «fascistophobie» ou l' »athéophobie » car la religion est une conviction, pas une race. Dans une société civilisée, aucune idée religieuse, politique ou philosophique ne peut prétendre à un traitement spécial ou être exemptée de critique.
SOUTENIR LA LIBERTE D’EXPRESSION. C’EST SOUTENIR LES GENS
Le blasphème est l’arme principale pour maintenir la terreur religieuse
- Les religions sont des doctrines et des idéologies. Tout comme les idéologies politiques, il est du droit de chacun de les remettre en question et de les critiquer, Toute idéologie politique ou religieuse qu’il serait interdit de critiquer serait qualifiée de totalitaire et dictatoriale par la plupart des gens.
- Quand une idéologie religieuse devient incritiquable et qu’une armée d’adeptes, de « défenseurs de la vertu, de moralisateurs ou de propagandistes » empêchent de la critiquer, c’est du totalitarisme religieux
- La criminalisation du blasphème, comme de l’apostasie est de nature politique plus que religieuse. Ce ne sont pas les versets du Coran mais les dirigeants autoritaires qui exigent le châtiment des blasphémateurs.
- « Le blasphème ne peut être que le fait du croyant. L’athée, l’agnostique, le sectateur d’un autre credo ne blasphème pas, il exerce son esprit critique et analytique. La foi de l’autre n’est qu’une opinion, une représentation du monde qu’il peut juger et récuser librement. Là sont la liberté d’opinion et son corrélat, la liberté d’expression auxquelles nous tenons essentiellement. » Marc Bonnant « Hommage à Charlie Hebdo », Le Matin (Suisse), 6 nov 2011
- La CEDH est très claire sur le blasphème quand elle note: «La Cour fait observer que ceux qui choisissent d’exercer la liberté de manifester leur religion en vertu de l’article 9 de la Convention ne peuvent s’attendre à le faire à l’abri de toute critique. Ils doivent tolérer et accepter le rejet par autrui de leurs croyances religieuses.»
Vidéos
Blasphémer, c’est sacré
Qu’est-ce que le blasphème, exactement ? A-t ‘on le droit de blasphémer en France ? Comment blasphémer poliment en société ? Le sujet du blasphème est traité avec beaucoup d’humour dans cette vidéo.
Vidéo de la chaîne YouTube » Un irréductible athée » en français de 9 min
Le blasphème, c’est quoi?
L’assassinat de Samuel Paty qui avait montré à ses élèves des caricatures de Mahomet, a relancé le débat sur le droit au blasphème et la liberté d’expression. Si le blasphème n’est pas une notion juridique, le droit de l’exercer est consacré par la loi de 1881. Nouvel épisode de notre série sur la liberté d’expression.
Vidéo de la chaîne YouTube Public Sénat en français de 3 min
Explication pour les plus jeunes: ça veut dire quoi le blasphème?
Le Pape vient à Troupaumé ! Il vient se recueillir dans le sanctuaire dans la forêt près de la ville où la vierge serait apparue à un fidèle au 19ème siècle. Babu publie une caricature. C’est le pape face à une jolie fille toute nue : « Le pape va enfin voir la vierge ! ». Fama est choquée, Romain rigole. Il n’est pas interdit de blasphémer à Troupaumé comme partout en France.
Vidéo de la chaîne YouTube Clemi en français de 2 min
Débat sur le blasphème
Est-ce qu’il est souhaitable qu’une religion s’arroge le droit d’interdire l’expression de certaines opinions dans l’espace publique ? Mais en même temps, est-ce que l’on peut tout dire ? Est-il légitime alors de monter au créneau pour défendre ses convictions religieuses ? Avec Jacques de Saint Victor, historien et écrivain, et Anthony Feneuil, philosophe et théologien.
Vidéo de la chaîne catholique YouTube KTOTV en français de 41 min
La laïcité, caricature et blasphème
Être libre de croire ou de ne pas croire, c’est poser la question du blasphème et de la caricature. Qu’on les trouve drôles ou pas, elles nourrissent le débat d’idées.
Vidéo de la chaîne YouTube Lumni France Télévisions en français de 4 min
Livres

» Eloge du blasphème » par Caroline Fourest
Après l’immense émotion qui a suivi l’attentat contre Charlie Hebdo, Caroline Fourest revient sur ces voix, ces « oui mais », qui, au nom de la « responsabilité », de la peur d’« offenser » ou du soupçon d’« islamophobie », n’ont pas voulu « être Charlie ».
Dans cet essai pédagogique sans concessions, elle recadre les débats sur la liberté d’expression et alerte sur les dangers d’une mondialisation de l’intimidation. Elle clarifie la ligne de fracture entre laïcité à la française et relativisme anglo-saxon. Entre droit au blasphème et incitation à la haine. Entre Charlie et Dieudonné. Entre rire du terrorisme, et rire avec les terroristes.

» Blasphème: Brève histoire d’un «crime imaginaire» » par Jacques de Saint Victor
Il avait disparu de notre horizon politique. Voltaire en avait fait une infraction d’un autre âge. La Révolution française allait le congédier du domaine de la loi, pour l’ériger en « crime imaginaire ». Et voici que le blasphème, notion si longtemps désuète, s’invite à nouveau dans notre vie publique, sourdement d’abord, puis au grand jour, dans le fracas des attentats sanglants de janvier 2015. Ce « péché de bouche » a une longue histoire qu’il faut retrouver pour mieux comprendre comment, d’un siècle à l’autre, il s’est articulé à nos guerres civiles et à nos conflits idéologiques. Outrage religieux, crime identitaire, délit politique : le blasphème n’a cessé de se métamorphoser au gré des époques, avant de déserter, en 1791, nos manières de penser, puis de réapparaître voilà quelques années sous des atours inédits. C’est cette trajectoire que Jacques de Saint Victor restitue afin de rendre intelligibles les raisons et les enjeux du débat que le blasphème suscite aujourd’hui. Son invocation récente, par certains, au nom du respect des « convictions intimes », met à l’épreuve un principe fondamental, propre à notre nation depuis des siècles, la liberté d’expression, et, au-delà, une manière singulière de s’entretenir des choses de la cité.

» Blasphémateur ! Les prisons d’Allah » par Waleed Al-Husseini
A 25 ans, Waleed Al-Husseini est un homme libre, et cette liberté, il en a payé le prix.
En 2010, il est le premier Palestinien d’origine musulmane incarcéré en Cisjordanie pour avoir rejeté l’Islam. Sur internet, seul espace de liberté, l’adolescent dénonçait les ressorts rétrogrades, violents et misogynes des textes coraniques et la pratique des religieux.
Mais on ne quitte pas l’Islam. L’Autorité palestinienne, qui se déclare pourtant laïque, en fait son ennemi public numéro un et l’arrête pour outrage à la religion. Commence alors un long et douloureux séjour dans les prisons palestiniennes, où il subit des tortures psychologiques et physiques. Il parviendra finalement à en sortir grâce à des soutiens internationaux, et trouvera asile en France.
Témoignage poignant, Blasphémateur ! offre le regard inédit d’un citoyen palestinien sur son propre Etat, paralysé selon lui par les conflits internes, la collusion des pouvoirs, la prégnance du religieux. C’est aussi le plaidoyer enflammé d’un homme déterminé à se battre pour la liberté de penser. Un homme des Lumières.

» Blasphème » par Asia Bibi
Asia Bibi a été condamnée à mort pour un verre d’eau.
Dans le village du Pakistan où elle vivait avec sa famille, les chrétiens sont persécutés. Parce qu’elle a osé boire un verre d’eau d’un puits que les musulmans considèrent comme leur étant réservé, elle a été accusée de blasphème, crime puni de la peine de mort au Pakistan.
Depuis, elle croupit en prison, dans des conditions épouvantables.
Le gouverneur du Penjab et le ministre des Minorités, un musulman et un chrétien, ont voulu lui venir en aide : tous deux ont été sauvagement assassinés.
Asia Bibi a épuisé presque tous les recours. Son seul espoir, c’est la grâce présidentielle. Et une mobilisation mondiale autour d’elle, afin de contrer la barbarie.
Du fond de sa prison, Asia Bibi a témoigné dans cat ouvrage paru en 2011. Un document terrible qui illustre les violences faites au nom des religions.
Liens utiles pour approfondir la question du blasphème:
article: Pourquoi le blasphème est-il passible de la peine capitale dans certains pays musulmans ?
Macron sur l’affaire Mila : « La loi est claire : nous avons droit au blasphème, à critiquer, à caricaturer les religions » AFP/Le monde
Dossier Blasphème (Charlie Hebdo)
Q’est-ce qu’un blasphème, un article de l’association CEFRELCO
Blasphème (Wikipedia)
Le blasphème (L’humanité future)
Blasphème et censure: https://www.non-croyant.fr/fichiers-athee/blaspheme.pdf
Le chevalier de la Barre , dernier exécuté pour blasphème en France
1881 : quand la IIIe République instaure un droit au blasphème
Les Irlandais votent à 70% l’abrogation du délit de blasphème